Archéologie aérienne J. Dassié. Prospections aériennes

ARCHEOLOGIE AERIENNE

Historique

     L'archéologie aérienne est réellement née en Syrie, vers 1925, avec les travaux d'un militaire français, jésuite, le Révérend Père Antoine Poidebard. Cet observateur aérien avait remarqué que, dans le désert, au soleil couchant, les longues ombres portées de reliefs infimes de la surface du sol révélaient parfois des structures géométriques !

      Cest à partir de cette constatation qu'il devint le premier prospecteur aérien systématique, rationnel et efficace, puisqu'il put ainsi cartographier tout le tracé du limes romain, avec l'aide des moyens techniques de l'Armée de l'Air.

      Ce précurseur fut suivi, en Afrique du Nord par le Colonel Baradez. Les Anglais furent les premiers à institutionaliser ces recherches, avec Crawford, Crampton et surtout J-K Saint-Joseph, avec toute la puissance du Department of Survey de Cambridge University...

Le R.P. Poidebard. © Université  Saint Joseph, Beyrouth, Liban.

Un peu d'archéologie aérienne.

Précisons brièvement ce que l'on entend par "archéologie aérienne, juste pour rendre cette histoire compréhensible de façon autonome.
L'archéologie aérienne, c'est l'utilisation de moyens aéronautiques pour s'élever au dessus du sol, afin de mieux percevoir les indices de structures archéologiques enfouies, les enregistrer et les communiquer ensuite aux Services Archéologiques qualifiés, participant ainsi à la connaissance et à la sauvegarde du patrimoine.

Dans certaines conditions, des structures archéologiques (fossés, fondations etc) enfouies peuvent induire à la surface du sol et dans la végétation des traces particulières. Une visite au sol permettra bien sûr de distinguer ces traces, éparses, mais sans pouvoir déceler leur éventuelle organisation, sans savoir si elles sont d'origine naturelle ou anthropique. Si par contre, on survole ce champ à ce moment-là, la vue aérienne, avec le recul apporté par l'altitude, montrera parfaitement la structure géométrique de ces traces, indice d'une origine humaine. Si on les photographie et que l'on communique les fiches descriptives et images aux autorités archéologiques responsables, on aura fait de l'archéologie aérienne, presque sans le savoir ! Voilà, vous savez tout sur la technique !

Le premier site...

En Septembre 1962, à bord d'un NC 858 familier, au départ de Pons, en compagnie d'un vieux camarade mais toujours très jeune pilote, nous faisions la sempiternelle promenade dans les environs, ne sachant pas trop où aller. Comme d'habitude et d'un commun accord, nous avons décidé d'aller faire un tour sur la cote, vers Royan. Pour la navigation, la route Pons-Royan était une sécurité pour mon co-pilote... De toutes façons, nous n'avions pas de cartes et si nous en avions, nous n'aurions probablement pas eu envie de les consulter... La flemme estivale ! Les bourgs défilent, Gémozac, Cozes et les anses des plages, appelées régionalement les "conches" apparaissent, dont celle de Royan, la "Grande Conche".
Tout d'un coup, là, sur la gauche, dans un grand champ vert foncé, je vois une grande tache claire, parfaitement circulaire. Réflexe du vacancier photographe, qui a toujours son 24 x 36 autour du cou : je prends deux ou trois clichés. La promenade continue cependant que la Gironde déroule ses fastes sous nos ailes et que nous rentrons au bout d'une heure, ravis tout de même de ce bon vol local.

Cette courte histoire aurait pu s'arrêter là, et notre vie en aurait sûrement été bien changée, bouleversée même. Mais elle continue et nous devons maintenant nous reporter l'hiver suivant, dans un appartement versaillais où, un certain soir de week-end, mes enfants m'ont demandé à revoir les photos des vacances passées. Pourquoi pas ? Sitôt dit, sitôt fait : on installe l'écran, le projecteur, les paniers sont chargés, et en avant la séance de diapos, terreur des amis de passage !

Ah oui, je me souviens : c'était une bonne ballade faite en compagnie de notre ami R. Les images défilent et après Cozes, un paysage agricole apparait... Rien de sensationnel, des champs, rien que des champs... mais diantre, qu'est-ce que j'avais bien pu vouloir photographier ? Si, cela me revient, j'avais remarqué ce truc circulaire et, à tout hasard, je l'avais "mis dans la boîte". Qu'est-ce que cela peut être ? Tiens, en examinant de plus près, on dirait qu'il y a plusieurs cercles où l'herbe est plus foncée, qui entourent cette zone claire...

Très intrigué, j'ai fait faire des tirages papier, plus aisés à manipuler et à montrer qu'une diapositive. Et j'ai commencé à enquêter, rechercher une explication à ces énigmatiques traces... Je vous livre de suite la clé de ce site : il s'agissait d'un champ de luzerne qui, en septembre, présentait une repousse appelée "regain". Ce regain avait poussé plus haut, plus vert plus dru à la verticale de petits fossés circulaires, creusés par nos ancêtres les Gaulois, à l'occasion de leurs rites funéraires. Cela, je l'ai su quelques années plus tard, quand, aidé par une société archéologique locale, des sondages ont été faits sur cet emplacement. Les fossés creusés dans la roche calcaire, étaient pleins d'humus, un humus qui retenait bien mieux l'humidité naturelle que la roche environnante, d'où la meilleure croissance du regain à leur aplomb, en cette période traditionnelle de sécheresse dans nos régions, en Septembre.

Au fil des ans et des vacances, j'ai recherché d'autres sites -et j'en ai trouvé-. J'ai pu mettre au point des méthodes de photographies -et de pilotage- bien adaptées à ces besoins. En fait, c'était toute une méthodologie de la prospection archéologique aérienne que j'élaborais progressivement. Une bien longue quête qui me conduisit dix ans plus tard à présenter un mémoire d'archéologie aérienne, pour le diplôme de l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales de Paris, et trois ans après, à soutenir une thèse de doctorat consacrée à l'archéologie aérienne devant la Faculté de Tours.

Découvertes, déclarations officielles auprès de la Direction des Antiquités et du Service Régional de l'Archéologie, s'enchaînèrent. Les communications aux colloques spécialisés devenaient plus fréquentes, ainsi que les articles dans les revues archéologiques. Sans l'avoir ni voulu, ni cherché, je devenais l'un des quatre ou cinq français précurseurs en ce domaine, chacun dans notre région. L'Etat demandait mon intervention avant ses grands travaux autoroutiers, des pays étrangers m'invitaient à leurs colloques. J'ai fini par écrire un ouvrage résumant l'ensemble de ces connaissances : un "Manuel d'Archéologie aérienne" publié par les Editions Technip, filliale de l'Institut Français du Pétrole.

De grands organismes me demandaient de faire des cycles de conférences à leurs ingénieurs. C'est ainsi que je suis devenu conférencier attitré de l'Institut du Pétrole et de l'Institut Géographique National. Mais il faut savoir raison garder, j'avais une famille et mon métier d'ingénieur électronicien était passionnant. Impossible de tout mener de front et j'ai dû décliner beaucoup de belles propositions, préférant conserver mon statut de prospecteur aérien strictement privé.
L'archéologie aérienne à temps complet !

Le temps ne supendant pas son vol, insidieusement tout arrive, même l'âge de la retraite professionnelle. Et c'est ainsi qu'un beau jour de 1985, en vacances dans mes Charentes, je ne suis plus reparti à Paris... Je suis resté en très grandes vacances et ce fut l'occasion de donner à mes travaux une autre dimension, avec une puissance de prospection accrue par cette présence locale permanente.

C'était aussi l'apparition des PC en informatique, avec la décision de placer tous nos résultats sur support informatisé. Devant les difficultés d'utiliser les programmes commerciaux de cette époque, nous avons programmé nous-mêmes une base de données archéologiques dédiée, la BAPC ou Banque Archéologique Poitou-Charentes, vite adoptée par les Autorités de tutelle, des Sociétés archéologiques, ainsi que des prospecteurs indépendants.

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