J'ai appris en conseil d'UFR d'Histoire de Paris IV hier ce qu'était
exactement la réforme du CAPES d'Histoire-Géo. Conclusion:
chassez Allègre par la porte, Lang arrive par la fenêtre
!
Lang avait présenté en février sa réforme
du CAPES. Son rapport est téléchargeable sur le site unef.org
Il a fait l'objet de débats sur ce forum (pas suffisamment sans
doute: ces questions ne semblent pas être de celles qui préoccupent
les différentes variétés de "refondateurs du mouvement
étudiant"). Il contenait un certain nombre de remises en cause
préoccupantes, mais remettait à plus tard la question essentielle,
celle des
programmes. Nous y sommes, pour l'Histoire en tout cas. A l'écrit,
les épreuves ne changent pas. En revanche, le programme est réduit:
il n'y aura plus que deux périodes à étudier, en
alternance. C'est quand même ennuyeux: on donne l'impression de
ne plus recruter que des demi historiens. Les profs se déclarent
soulagés, car ces deux questions correspondront à deux de
celles du programme de l'Agrégation. Cependant, on précise
que la formulation pourra en être adaptée, ce qui ouvre la
porte à
bien des choses.
Mais à l'oral, c'est sans commune mesure. L'épreuve actuelle
est une leçon sur le programme, le candidat ayant une bibliothèque
à sa disposition. On la remplace par une épreuve portant
sur les programmes du secondaire. A priori, ça peut ressembler
à la leçon de hors-programme de l'Agreg, et ça se
défend. Mais la suite est redoutable. En effet, ce programme sera
précisé ultérieurement sous la forme d'une liste
de thèmes. Les candidats n'auraient aux dernières nouvelles
que des manuels du secondaire à leur disposition, et on leur demanderait
de faire ce qu'ils feraient devant une classe, devant un jury prié
de retomber en enfance pour pouvoir apprécier leur prestation.
Le caractère totalement artificiel d'une telle épreuve
saute aux yeux. Il est évident qu'on n'est pas devant un jury de
concours dans les mêmes conditions que devant une classe, et qu'il
ne peut donc s'agir pour le candidat que d'une humiliante comédie.
Il pourra démontrer par une telle épreuve sa servilité,
mais certes pas sa compétence scientifique.
Une précision: le candidat qui tirera un sujet d'ancienne ou de
médiévale, périodes au programme en 6e et 5e, devra
apparemment faire une leçon de ce niveau là.
On retrouve la conception qui animait les projets d'Allègre: il
est inutile, voire nocif, de recruter des enseignants qui en sachent plus
que leurs futurs élèves.
Il y aura désormais à l'oral trois épreuves pseudo-pédagogiques,
et plus aucune épreuve scientifique.
Face à cette démolition totale, la réaction des professeurs
présents à ce conseil, qui semble représentative
si on en juge d'après les positions prises par les quatre associations
de spécialistes, est particulièrement désespérante.
En gros: "l'essentiel est préservé, puisque les cours pour
l'écrit pourront continuer comme avant; cherchons à mettre
en place une préparation spécifique pour l'oral". Un esprit
cruel dirait qu'ils sont prêts à voir sans réagir
scier la branche sur laquelle ils sont assis pourvu qu'on ne les force
pas à se lever avant qu'elle casse. Cette attitude n'est pas sans
rappeler leur position sur l'application de la réforme Bayrou-Allègre.
Précisément, à ce conseil, on a envisagé aussi
la semestrialisation totale. Sans réaction autre que la mienne.
Selon le
directeur d'UFR, le seul problème est celui de la session de rattrapage,
facilement soluble par... le déplacement de celle de janvier en
juin ! Quand j'ai tenté de parler du problème que cela posait
en terme de cohérence des enseignements et de recul par rapport
aux connaissances, on m'a d'abord traité comme un idiot, en m'expliquant
que cela ne changerait rien au total des heures de cours, puis comme un
aimable extra-terrestre. Même chose quand il fut question des ECTS.
Il y a cependant une raison de ne pas désespérer du CAPES,
du moins pas encore: cette réforme ne s'appliquera pas l'an prochain,
mais seulement pour le CAPES 2003. Ça laisse du temps pour une
réaction SI QUELQU'UN VEUT REAGIR.
Les positions à défendre me semblent simples:
1) Le maintien des quatre périodes à l'écrit
2) Une véritable leçon hors-programme à l'oral, sans
liste de thèmes mais
avec bibliothèque
3) La suppression de l'épreuve prétendument professionnelle
qui a montré sa
nocivité
Emmanuel Lyasse
[email protected]
juin 2001
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